Le rôle des tourbillons et de la marée dans la dispersion

Le flux de chaleur injecté par les sources hydrothermales dans la colonne d'eau provoque des mouvements verticaux qui entraînent l'eau environnante, créant ainsi un panache. Sur le site de Lucky Strike, le panache s'élève à environ 150 m au-dessus du fond de la mer. Comme l'injection de chaleur est continue, l'eau du panache doit être dispersée plus loin par les courants. Une question très importante est de savoir comment cette dispersion se fait, jusqu'où, et à quelle vitesse l'eau peut être exportée avant d'être complètement diluée. La réponse dépend de la variabilité spatio-temporelle des courants profonds. La variabilité temporelle est bien échantillonnée par le mouillage hydrographique de l'Observatoire. Le mouillage mesure le courant de fond ainsi que la température et la salinité de la colonne d'eau près des sources hydrothermales. Les mesures montrent un environnement très stable sur la période de dix ans. Les variations temporelles observées sont dominées par le cycle des marées à la période semi-diurne (pics dans les spectres de puissance). Sur des périodes plus longues, les variations ressemblent à du bruit, bruit qui est la signature de la turbulence. Cependant, à partir des observations effectuées en un seul endroit, il est impossible de déterminer la variabilité spatiale et la façon dont elle se combine avec la variabilité temporelle.

Spectres de puissance des courants de fond mesurés (à gauche) et carte de la vorticité autour de Lucky Strike à 1 500 m de profondeur, tels que révélés par les expériences numériques. Les spectres de puissance mesurent la variance des séries temporelles par période de temps. Les années 2011 et 2012 diffèrent parce que le mouillage hydrographique était à un endroit légèrement différent des autres années. Les zones de vorticité circulaires sont les tourbillons : en rouge les cyclones (tournant dans le sens inverse des aiguilles d'une montre) et en bleu les anticyclones (tournant dans le sens des aiguilles d'une montre).

Pour compléter les observations, nous utilisons des simulations numériques. Les simulations reproduisent les courants de la manière la plus réaliste possible en incluant tous les éléments connus : la bathymétrie, la distribution des masses d'eau à grande échelle, le forçage atmosphérique (vent, flux de chaleur, évaporation et précipitations) et le forçage des marées. A partir des simulations, nous interprétons le bruit turbulent des observations comme étant dû aux interactions des tourbillons de méso-échelle avec la topographie. Cette interaction est due aux tourbillons de surface, qui peuplent l'océan mondial. Les plus grands tourbillons s'étendent verticalement jusqu'au fond, où ils remuent l’océan profond, ce qui crée de petits tourbillons, dits tourbillons de sous-échelle. Nous avons montré que ces tourbillons augmentent la dispersion. Bien qu'ils soient principalement oscillants, les courants de marée contribuent également à la dispersion.

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